roll-over
Carte

Chapitre III
le centre de colonisation de Zemouri
(6 novembre 1873 – 6 août 1875)


L’enquête préliminaire: le rapport d’ensemble

Comme nous l’avons vu, c’est bien dans le but de compléter le peuplement de la colonie par l’élément français que le gouvernement général de l’Algérie choisissait ces divers territoires, qu’il reliait par les routes aux centres voisins y amenant l’eau, indispensable aux besoins des habitants et à l’irrigation ; construisait par la suite les bâtiments publics nécessaires pour constituer un village et y assurer les services administratifs, scolaires, religieux et médicaux .  Mais avant de décider de la création d’un centre, une enquête était toujours réalisée .  Pour la plaine de l’Isser et le projet de création du centre de colonisation de Zemouri, un rapport sur l’estimation des propriétés foncières, la qualité de la terre, le choix des emplacements avait été rédigé puis étudié par les services du cadastre . 

Une réunion générale tenue à Bordj-Menaiel le 23 avril 1872 par le contrôleur JULIA de l’administration des Ponts et Chaussées avait aussi permis d’éclairer les autorités civiles du gouvernement général sur la nature et la qualité des terres promises à la colonisation .  Ce dernier toutefois n’ayant pu tirer profit des explications fournies par les Indigènes, avait préféré parcourir lui-même les différents territoires . 

Après avoir visité toutes les zones afin d´étudier la nature des sols et la végétation, le contrôleur JULIA avait pu établir la classification suivante : 
  1. terres labourables : 3 classes
  2. Orangeraies : 1 classe
  3. Vergers : 1 classe
  4. Broussailles : 1 classe
  5. Palmiers-nains : 1 classe
  6. Dunes : 1 classe

Il avait cherché ensuite à connaître le prix moyen d’un hectare de terre. Pour les terres labourables, il avait pu admettre les chiffres suivants : 

  1. 350 francs l’hectare pour une terre de 1ère classe
  2. 50 francs pour une terre de 2ème classe
  3. 100 francs pour une terre de 3ème classe
  4. 3000 francs l’hectare pour une orangerie de 1ère classe
  5. 700 francs l’hectare pour des vergers de 1ère classe
  6. et 30 francs l’hectare pour des broussailles de 1ère classe

Sur la classification et le classement des propriétés foncières de la tribu, il avait pu diviser le territoire très étendu de la plaine en deux parties bien distinctes .  La première comprenait les terrains dits de plaine et la seconde les terres plus accidentées .  Les terrains de plaine se subdivisaient en : 

  1. terres labourables
  2. broussailles
  3. dunes

Les terrains accidentés en : 

  1. terres défrichées et cultures
  2. broussailles
  3. palmiers-nains

Après avoir terminé cette division générale du territoire, il avait ensuite comparé entre elles, les différentes subdivisions établies et avait déterminé la classification et le classement suivants : 

a-Terres labourables

Première classe :  terres de plaine bien exposées et placées sur la rive droite des Issers, propres à toutes les cultures y compris celle du tabac .  On pouvait également considérer comme terres de 1ère classe, les terrains sur lesquels se trouvaient les villages Arabes .  Ces terrains avaient été rendus excellents par les engrais qui y avaient été accumulés . 

Deuxième classe :  terres situées sur le versant sud des Issers ou sur les mamelons que coupaient les ravins qui se jetaient dans cette rivière .  Ces terrains étaient bons pour les céréales ; laissés en repos, ils donnaient d’excellents pâturages, mais ils exigeaient beaucoup de travail lorsqu’on les cultivait à cause de leur nature compacte .  Ils demandaient peu d’eau .  (On pouvait comparer les terres de cette classe aux terrains du SAHEL tant à cause de leur qualité, qu’au point de vue de leur situation topographique) . 

Troisième classe :  terres graveleuses ou sablonneuses, beaucoup moins productives que les premières ; elles étaient situées sur le versant de la mer ou enclavées dans les broussailles et les palmiers-nains .  On pourrait améliorer celles qui étaient près du littoral, mais pour cela, il faudrait beaucoup d’engrais . 

* Orangeraies :  les orangeraies étaient en petit nombre .  À peine une douzaine, mais elles étaient anciennes, de belle tenue, bien arrosées et bien exposées .  Placées entre les mains d’Européens, précisait le rapport, elles donneraient d’excellents fruits et rapporteraient beaucoup plus .  On pourrait donner à ces orangeraies, une superficie totale de 6 à 7 hectares .  Comme elles se trouvaient sur des terrains graveleux ou sablonneux, elles étaient peu élevées .  L’herbe n’y était pas abondante . 

* Palmiers-nains :  les palmiers-nains se trouvaient à l’est de la plaine sur les plateaux .  Ils étaient sur un terrain graveleux .  Les parcelles de terre qu’ils enclavaient étaient de mauvaise qualité, surtout celles qui étaient sur les plateaux les plus élevés .  On pourrait utiliser ces terrains comme pâtures . 

* Dunes :  les dunes étaient assez abondantes près de l’embouchure de l’Isser .  Elles ne donnaient aucun revenu . 

En ce qui concerne les rendements, il ressortait de l’étude menée par le contrôleur JULIA, que pour les terres labourables de 1ère classe, cultivées deux années sur trois, la première année en blé, la seconde en orge, les rendements moyens étaient de 10 pour 1 la première année et de 11 pour 1 la seconde année . 
Pour les orangeraies, tout portait à croire qu’elles pouvaient atteindre un revenu net de 150 à 200 francs par hectare .  Cultivées par les Européens, elles pourraient donner un revenu minimum de 300 francs par hectare . 

Au sujet enfin des propriétés bâties qui se trouvaient dans la plaine, on notait qu’elles étaient en très petit nombre, très mal construites et qu’elles n’avaient le plus souvent qu’une seule pièce habitable (soit 250 francs pour capital . 

Après cette étude, il convenait de rechercher la partie de la plaine la plus apte à recevoir des colons Européens sans beaucoup de frais pour l’État puis établir aussi exactement que possible la contenance de terrain minimum à donner à chaque famille .  En divisant le terrain des Issers, on remarquait immédiatement l´existence de deux zones différentes :  l’une à l’est était couverte de palmiers-nains et de broussailles, tandis que l’autre à l’ouest était presque toute en culture . 

Il y avait donc beaucoup plus de défrichements à faire à l’est .  Cette seule considération suffisait à conclure que la partie ouest du territoire était la seule qu’on pouvait utiliser avantageusement et dès à présent pour la nouvelle colonie . 

Au reste, il serait aussi avantageux pour l’État de créer une propriété communale avec tous les vergers et toutes les orangeraies séquestrés ; la commune les ferait exploiter à son bénéfice et elle aurait ainsi une rente annuelle assez élevée pour pouvoir subvenir, dès sa création, à la plus grande partie de ses dépenses obligatoires . 
De plus si le futur village européen était placé dans la partie est, il sera éloigné de tout centre de population et alors pour faciliter les transactions, l’État devra :  ou jeter un pont sur l´oued Isser et ouvrir en même temps une route pour réunir ce pont à Bordj-Menaiel et de là au grand marché des Issers, ou bien percer une route de 8 à 10 kms à travers le territoire de la tribu pour mettre le futur village en communication directe avec Blad-Guitoun . 

Par contre si ce même centre était établi dans la partie ouest, il suffirait de lui faciliter l’accès de la route de Dellys en utilisant les chemins arabes qui suivaient le fond des vallées formées par les grands ravins qui se jetaient soit dans la mer, soit dans les Issers .  Les dépenses de l’État seraient donc moins élevées dans le second cas que dans le premier .  C’est-à-dire en plaçant la colonie dans la partie déjà cultivée . 

Quelque soit le choix fait par la commission de colonisation, il paraîtrait enfin convenable de fixer l’emplacement du village, sur le versant de la mer, car c’est de ce côté que se trouvaient les sources les plus importantes ; celles qui ne tarissaient jamais aux direx des habitants du pays .  Enfin, le dernier point à éclaircir selon le contrôleur JULIA était la part minimum de terrain à donner par membre de famille . 
Selon lui, à Bordj-Menaiel où les terres étaient toutes de bonne qualité et avaient un rendement moyen de 10 pour 1 par hectare, on avait cru devoir porter au chiffre de 20 hectares la concession d’une famille composée du père, de la mère, d’un domestique et de deux enfants soit : 

  • 5 hectares pour le père
  • 5 hectares pour la mère
  • 5 hectares pour le domestique
  • 2.50 hectares pour le premier enfant
  • 2.50 hectares pour le second
en tout 20 hectares, ou 4 hectares par unité . 

Il serait donc souhaitable de porter à 25 hectares la concession à donner dans la plaine de l´Isser, à une famille composée du même nombre de personnes(en effet, si l’unité était de 4 hectares lorsque le rendement moyen était de 10 pour 1, elle devait être nécessairement de 5 hectares si le rendement n’était que de 8 pour 1 comme ici) . 

Le contrôleur JULIA, terminait enfin son rapport en laissant supposer que les colons qui se fixeront sur ce territoire, trouveront un bénéfice suffisant pour subvenir à l’entretien et au bien être de leur famille . 

b- Le choix des emplacements retenus

C’est quelques jours plus tard, le 2 mai 1872, que le gouvernement général civil de l’Algérie après avoir pris note des différentes conclusions concernant la nature des terrains et les emplacements des nombreux centres dans la plaine de l’Isser, décida de la création de trois villages .  Le premier serait situé à sept kilomètres de Blad-Guitoun à proximité de la route d’Alger à Dellys et prendrait le nom d’Isserville, le deuxième établi à Zaâtra, le troisième à Zemouri ou Zamouri avec un territoire de 1700 hectares . 

Afin de hâter autant que possible la création des centres et d’utiliser sans retard, pour les besoins de la colonisation, les terres fertiles de la vallée, le Préfet d’Alger avait proposé de prélever sur les fonds provenant de la contribution de la guerre, les sommes nécessaires à la construction des chemins .  Si de tout temps, les voies de communication avaient été considérées comme le plus sûr auxiliaire de l’occupation solide d’un pays, on pouvait dire que celles dont il s’agissait ici, qui rattacheraient directement au littoral les grandes routes d’Alger à Dellys et de Constantine par Palestro, auraient au point de vue des opérations stratégiques, une véritable importance, selon les hypothèses avancées . 

Le village de Zemouri serait placé au nord du lieu-dit Zaâtra et aurait un périmètre s’étendant jusqu’au littoral composé de quelques 1700 hectares .  Il serait de 40 feux soit 1000 hectares pour les lots de village, 200 hectares pour les lots de fermes et enfin, 500 hectares de communal, pris dans la partie avoisinant la mer . 

(Les deux autres seraient également de 40 feux pour un périmètre de 1400 hectares à Zaâtra et de 1700 hectares à Isserbourg) .  Cette partie retenue du territoire algérien d’après enquête, était abandonnée à la population Indigène des Issers El Ouidan, qui se composait de 2175 habitants . 

Ce chiffre fait ressortir qu’ainsi resserrés par ces créations de centre, les Indigènes séquestrés des Issers, conserveraient encore 1 hectare 40 ares de terre par tête d’habitant .  Toutefois, précisait l’enquête, il était démontré qu’en raison de la qualité du sol, cette étendue ne pouvait offrir des ressources suffisantes à cette population ; l’administration pourrait y pourvoir, soit en se désistant au profit des Indigènes des 500 hectares, que la commune proposait de réserver pour des besoins ultérieurs, soit en donnant des compensations à un certain nombre de ces Indigènes . 


Une fois l’implantation du centre décidé, les travaux d’installation débutèrent rapidement .  Les travaux d’assèchement furent confiés au sieur ALI BEN HAMOUD, entrepreneur, et les premières plantations d’eucalyptus assurées par un pépiniériste d’Alger, Monsieur TROTTIER .  Dans l’œuvre de la colonisation et du peuplement, il était un point capital qui appelait toujours l’attention, c’était la santé publique .  En effet, comme il était à prévoir que les colons seraient cruellement éprouvés par les maladies, quand les chaleurs viendraient, il fallait prendre les mesures indiquées par l’expérience déjà acquise… on devait assécher et planter . 

D’ailleurs concernant Zemouri, on constatait déjà que la population ouvrière renfermait beaucoup de malades .  Le médecin de colonisation attribuait les nombreuses maladies qui sévissaient aux terrassements exécutés sur un terrain marécageux .  En effet, sur les cinquante hommes d’un pénitencier, employés dans le courant de l’été 1873, par ALI BEN HAMOUD, pour le compte de l’État, 15 avaient été traités à l’ambulance militaire du col des Beni-Aïcha, tous atteints de fièvres . 

Il faut dire aussi que le futur village avait été tracé dans un amas presque impénétrable de figuiers de Barbarie, au milieu desquels, il avait fallu jouer de la pioche et de la hache… . Le sol avait été remué partout à sa surface et en quelques endroits à une certaine profondeur, il était aussi incontestable que le premier qui remuait ce sol, à proximité duquel se trouvaient des marais, soit pour le défricher, soit pour y faire des travaux de terrassements quelconques, s’exposait à des fièvres fort tenaces et fort graves . 

c-le peuplement de la colonie

Une fois l’emplacement choisi, le gouvernement général examina les résultats des différentes commissions destinées à recevoir les engagements, à constater la moralité, l’aptitude et les ressources des futurs colons .  Pour le centre de Zemouri, il fut décidé que quarante familles d’anciens Algériens, connaissant la culture viendraient s’installer sur le site . 

Si il était à la fois utile et juste de donner au futur centre un certain nombre de concessions à de jeunes ménages de cultivateurs laborieux déjà installés –ce serait un exemple excellent à mettre sous les yeux de nouveaux venus- c’était pourtant manifestement trop, car quelque fut le mérite de ces colons, ils n’augmentaient pas à proprement parler le peuplement de la colonie ; leur installation n’était qu’un déplacement .  Ce choix obéissait peut-être aussi, à une finalité politique .  Cette concentration extrêmement poussée de colons aguerris dans un même territoire, n’était-elle pas une réponse à la révolte d’EL MOKRANI en Kabylie (1871) ? Ne fallait-il pas peupler cette région d´une population européenne avant tout, capable de dominer les Indigènes ? Le centre de colonisation de Zemouri fut en tous les cas l’exemple d’une politique d’installation neuve et originale . 

Á Zemouri, les difficultés du début ne devaient pas trop effrayer le colon déjà acclimaté alors que pour les autres centres créés de la plaine, l’arrivée massive d’Alsaciens-Lorrains, doublement dépaysés devant un décor inconnu et un métier que la plupart- anciens ouvriers de fabrique- ne connaissaient pas, risquait de poser des problèmes d’adaptation (ce choix d’ailleurs, pourrait servir d’explication pour le constat d’échec ou de réussite du programme) . 


L’état nominatif des familles installées à Zemouri comme concessionnaires dans les conditions des titres premier et second du décret du 16 octobre 1871, était le suivant : 


Joseph COLLOT de Rouiba (cultivateur)
LOT n°1 d’une contenance de 29 hectares 62 ares 40 centiares .  Terrain un peu accidenté et couvert de broussailles .  Terre et prairie d’assez bonne qualité .  Jardin et quelques figuiers . 

Pierre JANEL (agriculteur)
LOT n° 2 d’une contenance de 29 hectares 04 ares 80 centiares .  Terrain sur un plateau couvert de broussailles .  Terre un peu légère mais de bonne qualité .  Jardin . 

Nicolas Georges de FOUKA (agriculteur)
LOT n°3 d’une contenance de 29 hectares 31 ares 65 centiares .  Terrain sur un plateau couvert de broussailles .  Terre un peu légère, prairie de bonne qualité . 

Laurent SAVOIE de Bab-Ali (agriculteur)
LOT n°4 d’une contenance de 24 hectares 81 ares 60 centiares .  Terrain sur un plateau couvert de broussailles .  Terre de qualité médiocre .  Terre en plaine de bonne qualité .  Jardin . 

Pierre REAL de Rivet (fils de colon)
LOT n°5 d’une contenance de 28 hectares 76 ares 90 centiares .  Terre un peu légère couverte de broussailles, prairie d’assez bonne qualité .  Jardin . 

Raymond FAURE (agriculteur)
LOT n°6 d’une contenance de 29 hectares 25 ares 40 centiares .  Terre un peu légère couverte de broussailles .  Prairie d’assez bonne qualité . 

Eugène PAGNON de Sidi-Moussa (agriculteur)
LOT n° 7 d’une contenance de 30 hectares 28 ares 55 centiares .  Terre un peu légère, bonne prairie, Jardin . 

Claude MONIN de Fouka (agriculteur)
LOT n°8 d’une contenance de 33 hectares 37 ares 40 centiares .  Terre sur un plateau couvert de broussailles, de qualité assez bonne .  Jardin . 

Jean-Baptiste OSTER de Reghaïa
LOT n°9 d’une contenance de 30 hectares 58 ares 45 centiares .  Terre en grande partie couverte de broussailles, quatre pieds d’orangers mais de médiocre importance .  Terre en plaine de bonne qualité .  Jardin et figuiers . 

François GERVAISEAU (cultivateur)
LOT n°10 d’une contenance de 30 hectares 13 ares 20 centiares .  Terre un peu légère presque toute en plaine et couverte de broussailles .  Jardin . 

François GRAZIANI d’Hussein-Dey (cultivateur)
LOT n°11 d’une contenance de 40 hectares 13 ares 95 centiares .  Terre presque en plaine mais couverte de broussailles de bonne qualité .  Jardin . 

Joseph CHABERT (cultivateur)
LOT n°12 d’une contenance de 29 hectares 96 ares 45 centiares .  Terrain sur un plateau couvert de broussailles .  Terre un peu légère . 

Isidore CARRON d’Hussein-Dey
LOT n°13 d’une contenance de 28 hectares 31 ares 40 centiares . 

Jean-Baptiste AMBAL de Koleah (agriculteur)
LOT n°14 d’une contenance de 31 hectares 24 ares 10 centiares .  Terre labourable d’assez bonne qualité .  Jardin . 

Alexis LAFONT de Bordj-Menaïel (cultivateur)
LOT n°15 d’une contenance de 29 hectares 08 ares 80 centiares .  Terre labourable de qualité assez bonne .  Jardin .  (Mise en possession le 20 . 12 . 1873)

Jean-Baptiste AMOUROUX –Immigrant de Saint-Cannat (B . D . R . ) (cultivateur)
LOT n° 16 d’une contenance de 29 hectares 68 ares 15 centiares .  Terre labourable de qualité assez bonne .  Terre couverte de broussailles de qualité assez bonne .  Jardin . 

Claude REAL de Rivet (fils de colon) (agriculteur)
LOT n°18 d’une contenance de 31 hectares 53 ares 60 centiares .  Terre labourable d’assez bonne qualité .  Jardin . 

Fleury BASSON de Koleah (cultivateur)
LOT n°19 d’une contenance de 33 hectares 14 ares 90 centiares . 

Victor FRANCOIS de Castiglione (cultivateur)
LOT n°20 d’une contenance de 32 hectares 52 ares 20 centiares .  Terre labourable d’assez bonne qualité . 

Auguste MONIN de Fouka (cultivateur)
LOT n°21 d’une contenance de 30 hectares 81 ares 80 centiares .  Terre labourable et d’une bonne qualité .  Terre un peu légère et couverte de broussailles .  Terre complantée de figuiers . 

Gilbert BAILLY (agriculteur)
LOT n°22 d’une contenance de 28 hectares 09 ares 05 centiares .  Terre labourable et d’une bonne qualité .  Jardin . 

Jean SAUNIER de Saint-Paul (cultivateur)
LOT n° 23 d’une contenance de 28 hectares 74 ares 50 centiares .  Terre labourable d’assez bonne qualité et dans la partie nord 3 hectares de terre sablonneuse .  Jardin .  Quelques figuiers . 

Antoine ANTONI de l’Agha supérieur (menuisier)
LOT n°24 d’une contenance de 31 hectares 93 ares 45 centiares .  Quelques hectares de terre labourable d’assez bonne qualité .  Jardin . 

Guillaume GEGOU d’Aïn-Taya (cultivateur)
LOT n°25 d’une contenance de 29 hectares 76 ares 50 centiares .  Terre couverte de broussailles et en partie un peu légère .  Jardin . 

Ferdinand MOULLET de Baba-Hassen (fils de colon)
LOT n°26 d’une contenance de 39 hectares 12 ares 60 centiares .  Terre couverte de broussailles .  Terre en plaine couverte de broussailles mais de bonne qualité . 

Jean-Fortuné CASSE de l’Alma (cultivateur)
LOT n°27 d’une contenance de 28 hectares 45 ares 60 centiares .  Prairie et broussailles en plaine de bonne qualité .  Jardin .  Gourbi . 

Jean VITRAC de Tefechoun (agriculteur)
LOT n°29 d’une contenance de 25 hectares 73 ares 70 centiares .  Terre en plaine couverte de broussailles mais de bonne qualité .  Jardin et gourbi couvert . 

Zacharie MEGY de l’Arba (cultivateur)
LOT N°30 d’une contenance de 25 hectares 69 ares 70 centiares .  Prairie et broussailles en plaine de bonne qualité . Jardin . 

Joseph PISTRE
LOT n°31 d’une contenance de 24 hectares 99 ares 60 centiares .  Terre en plaine, partie en prairie et partie en broussailles .  Bonne terre . 

Joseph DESACTES d’El-Biar (profession libérale)
LOT n°32 d’une contenance de 35 hectares 90 ares 85 centiares .  Terre en plaine de bonne qualité mais couverte de broussailles .  Jardin et quelques pieds de figuiers . 

Léonard PETIT (cultivateur)
LOT n°33 d’une contenance de 26 hectares 64 ares 60 centiares .  Terre en plaine couverte de broussailles mais de bonne qualité . 

Dominique BOUCHE de l’Alma (cultivateur)
LOT n°34 d’une contenance de 28 hectares 69 ares 85 centiares .  Terre en plaine de qualité mais couverte de broussailles .  Terrain accidenté . 

Frédéric PERAULT de Maison-Carrée (cultivateur)
LOT n°35 d’une contenance de 28 hectares 96 ares 75 centiares . 

Terre labourable et broussailles .  Jardin . 

Joseph SERRE (cultivateur)
LOT n°36 d’une contenance de 25 hectares 38 ares 75 centiares .  Terrain accidenté .  Terre en plaine de bonne qualité couverte de broussailles .  Deux gourbis . 

Joseph GUSSY de Boufarik (cultivateur)
LOT n°37 d’une contenance de 28 hectares 46 ares . 

Terrain en plaine de bonne qualité mais couverte de broussailles . 

Bernard PEREZ
LOT n°32

Antoine DUVIALARD (immigrant de Corrèze)
LOT n°39 d’une contenance de 54 hectares 47 ares 30 centiares .  3 hectares de terre labourable de bonne qualité, le reste en broussailles de mauvaise qualité .  Un olivier sauvage . 

Jean BRUYERES de la Rassauta (cultivateur)
LOT n°40 d’une contenance de 27 hectares 99 ares 90 centiares .  Terre labourable et broussailles .  Jardin et un beau gourbi en construction . 


Le peuplement du centre fut donc au départ composé de ces 40 familles représentant 150 personnes d’origine géographique et sociale diverses .  36 étaient cultivateurs et déjà domiciliés en Algérie, 3 étaient fils de colon, 5 étaient immigrants, 2 étaient industriels, 2 autres enfin exerçaient des professions libérales .  Chacune des 40 familles était d’origine française (à l’exception de la famille OSTER, allemande) et composée d’au moins trois personnes . 

L’état civil de chacun a permis de dresser une carte du lieu de naissance en France des premiers arrivants .  La diversité des origines géographiques pourrait nous apparaître ici, comme une limite au regroupement qui avait souvent scindé en Algérie, des communautés entières autour de mêmes usages et coutumes . 

La naissance du centre

L’arrivée des premiers émigrants eut lieu, dans le courant du mois de novembre 1873 .  Malgré la bonne volonté générale, les travaux n’étaient pas encore terminés quand arrivèrent les premiers colons .  Certains d’entre eux arrivés à mulet au village, trouvèrent un emplacement encore dépourvu d’eau et des lots ruraux inabordables, et ce, malgré l’énorme effort entrepris par les services de la colonisation . 

a- Les travaux exploratoires

Une fois le tirage au sort des emplacements à bâtir et des lots de culture effectué, les familles pouvaient s’installer définitivement .  Ce travail marquait en général pour l’administration, la naissance de la colonie .  A Zemouri, ce fût le 6 novembre 1873 à midi, que le chef de circonscription assisté du géomètre M .  DUSTOU, du service topographique, procéda à l’opération . 

On tirait d’une urne, le nom du concessionnaire, et les lots sortants étaient définitivement attribués au colon… Un plan du village dressé par l’ingénieur pour l’administration avait été dessiné à l’occasion .  Alexis LAFONT s’installa très précisément à Zemouri, avec sa femme et ses deux fils, le 30 décembre 1873 (sa fille aînée, Augustine, s’était mariée le 30 juillet 1870 à Martin ROS, agriculteur de Douaouda, et vivait séparée d’eux) . Ce jour-là, un géomètre procéda au bornage des lots et des bornes de pierre de 0,50 cm de hauteur furent successivement plantées sur les lots qu’avait reçu la famille . 

Ses différents lots étaient les suivants : 
N°15 rural, d’une contenance de 8 hectares 54 ares 85 centiares, limité au nord par un ravin et par un chemin, à l’est par le lot n°16, au sud par le lot n°22 et à l’ouest par les lots 23 et 24 . 

N° 38 rural, d’une contenance de 20 hectares 46 ares 5 centiares, limité au nord par le lot n°1 du communal, à l’est par le lot n°37, au sud par un chemin et à l’ouest par le lot n°84 et le lot n°39 . 

N° 15 urbain, d’une contenance de 7 ares 90 centiares, et limité au nord par le lot n°14, à l’est par une rue, au sud par le lot n°16 et à l’ouest par le lot n°17 . 

Alexis, consacra au départ tout son temps, son argent et son énergie à défricher ses terres recouvertes de hautes broussailles au prix de mille difficultés de climat (l’hiver fut rude) et de manque de matériel agricole ; chaque colon ne disposant que d’une paire de bœufs, une charrue et quelques outils de fortune . 
Il était en effet essentiel, que les colons puissent se procurer le plus tôt possible, les légumes frais si utiles pour leur famille .  Il ne fallait donc pas perdre de temps pour commencer les cultures .  Le travail de défrichement fut rendu pénible par l’importance des palmiers-nains, et la présence d’un lac de quatre hectares (situé sur la propriété BOURNOUVILLE) qui occasionnait des fièvres à tous les habitants . 


Mais le problème majeur pour les premiers résidents du centre, fut la question de l’alimentation en eau de la colonie .  L’eau de source suffisait à peine, en mai 1874, une première réclamation fut déposée en mairie, pour demander la construction d’une fontaine . 

Le centre qui possédait déjà deux fontaines alimentées par deux sources, l’Aïn Krim et l’Aïn Guettar, connaissait depuis le début du printemps, une sécheresse exceptionnelle .  Le débit journalier des deux fontaines, quoique suffisant pour la consommation personnelle et l’alimentation des ménages, n’était pas assez considérable, pour assurer la survie du bétail .  Á la fin de l’été, l’une des deux fontaines cessa même de couler et les bêtes dépérirent .  L’État avait aussi des devoirs envers ses colons, et le premier était l’ordre . 

b- Organisation de la colonie

L’organisation devait être décidée ; aussi lors de la première délibération du conseil municipal de la commune Indigène des Issers, dont dépendait Zemouri, il fut décidé de l’installation d’un adjoint spécial pour la colonie et de l’organisation de divers services .  Le 14 février 1875, sous la présidence du maire des Issers, nommé par arrêté préfectoral, et en présence de l’adjoint spécial M .  FAURE, pour le centre de Zemouri, il était fait appel tout de suite à l’union des hommes qui devaient travailler pour la prospérité de la commune et de son annexe, et comprendre qu’il ne devait y avoir parmi eux, ni Métropolitains, ni Alsaciens-Lorrains, ni anciens Algériens mais seulement de bons Français Algériens s’occupant de la grandeur de la colonie en général et de la commune en particulier .  Le Maire donnait ensuite connaissance au conseil de sa dépêche à M .  le Préfet, demandant l’installation d’urgence d’une fourrière à Zemouri . 

Passant à la question des écoles, le maire avait rendu compte ensuite, qu’il allait se mettre en relation avec M .  le Recteur de l’Académie d’Alger, au sujet de l’installation d’une école pour filles et garçons à Zemouri .  Pour éviter des frais et dépenses trop élevés, il proposait au conseil de réunir dans l’immédiat, l’école des garçons à celle des filles et comme local pour la future école de Zemouri, de se servir de la baraque double qui avait été affectée au logement de Monsieur le curé . 

Avec cette baraque double et une autre simple, le centre de Zemouri, se trouvera être en possession d’un local suffisant pour y installer une école-chapelle .  Ces baraques seront dressées sur la place centrale, et l’école sera dirigée par l’institutrice communale qui débutera par un traitement de 1200 francs par an, sans indemnité de logement, ni autre de quelque nature que ce soit . 

La colonie devra faire l’achat des livres nécessaires pour l’instruction des enfants, fréquentant l’école, mais le prix d’achat des ouvrages et fournitures d’école, livrés aux enfants, par la commune pour leur instruction, sera remboursable par leurs parents le 1er août de chaque année .  Le maire annonçait enfin, au conseil, qu’il avait l’intention de faire des démarches auprès de M .  le Préfet, pour obtenir une subvention de 300 francs, somme présumée nécessaire pour l’installation de cette école .  Le maire fit ensuite observer au conseil, que jusqu’à ce jour, il n’y avait aucun règlement régissant les communaux de la section de Zemouri .  Il lui proposa provisoirement le suivant qu’il pourra modifier du reste, quand besoin se fera sentir : 

Article 1er : 
le communal du centre de Zemouri étant une réserve territoriale spéciale, faite par les administrations supérieures en faveur des concessionnaires ordinaires pour le pâturage de leurs troupeaux, il sera interdit formellement à tout indigène, de la section, d’y conduire paître quel animal que ce soit . 
Article 2ème : 
il pourra être fait exception à cette règle en faveur des Indigènes ou étrangers fermiers ou locataires de concessions entières appartenant à des colons n’exploitant pas eux-mêmes .  Mais dans ce cas, le conseil se réservera expressément pour prévenir tout abus, de fixer le nombre et l’espèce des animaux qui pourront être conduits en pacage, dans le communal du centre . 
Article 3ème : 
les colons pourront couper du bois tout autre que chêne liège, caroubier et olivier . 
Article 4ème : 
toute contravention aux présentes dispositions, sera punie conformément à la loi . 

Le conseil à l’unanimité, déclara accepter ces quatre articles .  Le maire déclara ensuite au conseil, qu’avec les crédits de 300 francs alloués pour chacun des centres des Issers et de Zemouri, il ne pourra guère arriver à planter les rideaux d’arbre tels qu’ils avaient été projetés par l’administration, néanmoins, il demanderait autorisation de faire terminer ces plantations, la saison étant favorable .  La différence entre le crédit alloué et la somme nécessaire, sera minime et le maire pensa pouvoir compter sur le concours de l’administration supérieure, toujours prête à encourager ces sortes d’opération, dans la mesure de ses moyens . 

La nouvelle commune se trouvait dans une position difficile, le maire pensa pouvoir dire également sans rien préjuger toutefois, qu’elle pourra compter assurément sur la générosité de l’administration pour parfaire la petite somme qui constituera la différence .  Il demandera aussi, l’autorisation de désigner une personne, spécialement chargée de l’entretien et de la garde des plantations . 

Le conseil à l’unanimité émit ensuite le vœu suivant : 

que le centre de Zemouri où des caniveaux pour l’écoulement des eaux, où des trottoirs pour contenir la terre des bas-côtés sont à tracer et à faire, soit enfin terminé et que le service de fontaines, puits, voirie et monuments publics de la commune soit remis à la municipalité aussitôt que le tout aura été mis en bon état par les ponts et chaussées . 

Les dernières dispositions prises concernaient enfin, le choix de la date du 6 novembre, pour l’époque de la fête patronale ; le vote d’une indemnité annuelle de 240 francs accordée à l’adjoint spécial de la section de Zemouri, celle allouée au maire des Issers étant portée à 1000 francs ; et la nomination d’un garde champêtre, M .  MEILLON, pour un traitement annuel de 700 francs . 

Suivait le règlement du garde champêtre : 

Dans le village

le garde champêtre assistera aux audiences du conseil municipal, et il accompagnera les autorités dans les cérémonies publiques .  Il prêtera main forte à l’autorité toutes les fois qu’il en sera requis, il fera fonction de crieur public gratuitement pour le service public et pour les particuliers, à raison de 0,50 francs par publication . 

Aux champs

il prendra connaissance et tiendra en cahier les arrêtés concernant la police rurale de la colonie, il fera la tournée aux jardins au moins une fois toutes les 24 heures et tâchera de surprendre tous les malfaiteurs .  Il constatera les dommages, recevra les déclarations des particuliers et observera tous les indices qui pourraient l’amener à découvrir les coupables .  Il devra prendre connaissance exacte des limites des parcelles, et des noms des propriétaires .  Il visitera de temps à autre, les diverses parties du territoire de Zemouri, dont il devra apprendre à connaître parfaitement les limites ; pourra constater les dommages qui pourraient être faits, dans les champs ensemencés ou dans les praires non encore fauchées de l’année . 
La crainte d’être surpris par lui, si on le sait actif, suffira à empêcher le mal .  Il constatera le dommage qui lui serait dénoncé, il veillera aussi à la conservation des arbres et fera son rapport pour tout arbre coupé au pied .  Il dressera procès verbal contre ceux qui mèneront les bêtes isolées aux champs, il avertira l’autorité des maladies contagieuses qui auraient attaqué les troupeaux .  Il avisera à ce qu’on n’allume pas de feux dans les chambres, près des maisons, bois, vergers, meules de grains, de paille ou de foin .  Il prendra connaissance du troupeau de bœuf de la colonie et de leurs pâturages .  Il est nécessaire, qu’il en connaisse aussi les gardiens .  Il donnera avis des individus qui s’établiront sur le territoire de la colonie .  C’est au temps des récoltes surtout, qu’il devra redoubler de surveillance, et constater les délits de chasse .  Il surveillera enfin, fontaines et abreuvoirs du village . 

Eaux d´irrigation

le garde de Zemouri veillera aux bonnes distributions des eaux d’irrigation, distributions qui auront lieu conformément au règlement que Monsieur le Maire s’est promis de revoir à ce sujet . 

Arrêté concernant la garde de nuit

Attendu que pour éviter les vols de la part des Indigènes, il sera urgent dans l’intérêt public, qu’une garde de nuit soit organisée, le garde sera ainsi à la disposition de la colonie pour tout ce qui pourra intéresser l’ordre et la tranquillité .  »

Ainsi animés d’une volonté farouche, les hommes s’organisaient et continuaient leur travail avec persévérance .  Par décret Présidentiel du 6 août 1875, le territoire du centre de Zemouri fut détaché de la commune Indigène des Issers et rattaché à la commune de plein exercice de Blad-Guitoun, plus proche  .  (Les actes de l’état-civil passés jusqu’à ce jour à la mairie de Bordj-Menaïel, seront à partir de cette date, dressés sur les registres de Bled-Guitoun) . Pour Zemouri, une nouvelle page de son histoire allait s’ouvrir . 

Yves BANDET, Mise en page le 6 février 2009